CHAPTER III
RETURN TO INDIA
THE four remaining years of Toru’s life after her return from Europe were spent partly in the city house at Rambagan and partly in the Garden House at Baugmaree, where
The light green graceful tamarinds abound Amid the mangoe clumps of green profound.
Mr. Gosse has told us ‘she was born to write, and despairing of an audience in her own language, she began to adopt ours as a medium for her thought’. The story of these later years is best told in her letters. Toru’s letters written in England contained constant references to French and English literature. These letters were destroyed many years ago, a source of great regret, as they would have thrown additional light on a life of which the slightest detail is precious. We believe, however, that they were neither so well written nor so interesting as the later ones from India.
In July 28, 1874, her only sister, Aru, died of phthisis at the age of twenty, the seeds of which were sown in her constitution when in England, and Toru, now left alone, engrossed herself in her literary pursuits. Her proficiency in the French language was, as we have seen, acquired in Europe. Her departure from Europe interfered with her studies for a time, but she never lost sight of the object on which she had set her heart. Shortly after her return home, when she was barely eighteen, she published her first essay, on Leconte de Lisle, in the Bengal Magazine, December, 1874, containing some translations from his works into English verse. Of this essay, Mr. Gosse tells us that the subject was ‘a writer with whom she had a sympathy which is very easy to comprehend’. In the same number of the Bengal Magazine appeared her essay on Henry Vivian Derozio. This was followed by occasional translations from French poetry. Her knowledge of French literature, especially of contemporary French poetry, as we shall presently see, was very unusual for a girl of her age. ‘To the end of her days,’ says Mr. Edmund Gosse, ‘Toru was a better French than English scholar. She loved France best, she wrote its language with more perfect elegance.’ She was soon to complete also the translations contained in The Sheaf gleaned in French Fields.
Toru Dutt commenced the study of Sanskrit in conjunction with her father, who remained to the last her constant companion in all pursuits, literary or otherwise. To her rich store of Western learning there was now added a good acquaintance with Sanskrit literature. Unfortunately, her failing health prevented her from plunging into its depths, and her study of Sanskrit lasted not quite a year. During that period she made several translations.
Let us add that a few months before Toru’s death, a book written by the late Mlle Clarisse Bader, a French authoress of repute, La Femme dans l’Inde Antique, fell into her hands. Toru was so charmed with it that she asked the writer to allow her to translate it into English for the benefit of Indian readers less informed than herself. The correspondence ensuing therefrom ripened into a warm friendship between minds which, though widely separated by race and language, were united by similarity of sentiments. Toru’s letters to Mlle Bader, written in French, have a charming simplicity. It begins with Mlle Bader’s response to Toru’s request.
Paris, ce 16 Février 1877. Rue de Babylone 62.
CHÈRE MADEMOISELLE,—Eh quoi! C’est une descendante de mes chères héroïnes indiennes qui désire traduire l’œuvre que j’ai consacrée aux antiques Aryennes de la presqu’île gangétique! Un semblable vœu, émanant d’une telle source, me touche trop profondément pour que je ne l’exauce pas. Traduisez donc La Femme dans l’Inde Antique, mademoiselle; je vous y autorise de tout mon cœur; et j’appelle de tous mes vœux le succès de votre entreprise.
Je montrai hier soir votre lettre et votre charmant recueil à un illustre indianiste, dont la réputation doit vous être connue, M. Garcin de Tassy, Membre de l’Institut. C’est un ami de votre savant voisin, Rajendralala Mitra. M. Garcin de Tassy fut si émerveillé de votre généreux courage qu’il prit votre adresse pour vous envoyer aujourd’hui même l’un de ses ouvrages.
Vous êtes Chrétienne, mademoiselle: votre livre me le dit. Et, en vérité, votre rôle nous permet de bénir une fois de plus la divine religion qui a permis à une Indienne de développer et de manifester cette valeur individuelle que le brahmanisme enchaîne trop souvent chez la femme.
Si, comme historienne de la femme, je suis charmée de féliciter en vous une émule, je ne suis pas moins touchée comme Française d’avoir à remercier en vous l’élégante traductrice des poètes, mes compatriotes. Votre beau livre m’apprend que vous aviez une sœur qui, elle aussi, partageait vos goûts poétiques. Le Seigneur a rappelé auprès de Lui l’âme qui avait si fidèlement interprété le chant de ‘La Jeune Captive’, et qui cependant, parvenue à l’heure suprême, n’a plus redit:
The world has delights, the Muses have songs: I wish not to perish too soon.
Lorsque vous aurez publié dans l’Inde votre traduction de La Femme dans l’Inde Antique, je vous serai reconnaissante de vouloir bien m’envoyer deux exemplaires imprimés de votre version. Je serais aussi très-heureuse de recevoir votre photographie si toutefois vous la possédez déjà.
Laissez-moi vous redire, en terminant, combien la sympathie d’une enfant de l’Inde m’est précieuse. Depuis les heures délicieuses que m’avaient fait passer vos ancêtres, j’ai suivi la femme, chez les Hébreux, chez les Grecs, chez les Romains. Quatre volumes ont ainsi succédé à La Femme dans l’Inde . . . et cependant il y a peu de jours encore, comme mon second père, le grand Evêque d’Orléans, me demandait chez quelles femmes j’avais trouvé le plus de beauté morale, je répondais: ‘Si j’en excepte les femmes bibliques, c’est chez les Indiennes que j’ai trouvé le plus de pureté et de dévouement.’
Croyez, mademoiselle, à mes cordiales sympathies.
CLARISSE BADER.
Chez son père, officier supérieur en retraite, officier de la Légion d’Honneur, attaché au Ministère de la Guerre, rue de Babylone 62, à Paris.
P.S. Ainsi que vous me l’écrivez, mademoiselle, c’est dans l’Inde que sera publiée votre traduction anglaise. Ce ne serait que dans le cas où cette version serait publiée en Angleterre que l’intervention de mon éditeur serait nécessaire. Mais, comme il me l’a dit lui-même, il ne voit aucun inconvénient à ce que votre traduction paraisse dans une région aussi lointaine que l’Inde.
Miss Toru Dutt to Mlle Clarisse Bader.
Calcutta, ce 18 Mars 1877.
CHÈRE MADEMOISELLE,—Je vous remercie bien sincèrement de votre bienveillante autorisation de traduire La Femme dans l’Inde Antique, et aussi de votre bonne et sympathique lettre, qui m’a causé le plus vif plaisir.
Je suis désolée de n’avoir pu commencer la traduction encore; mais ma constitution n’est pas très forte; j’ai contracté une toux opiniâtre il y a plus de deux ans, qui ne me quitte point. Cependant j’espère mettre la main à l’œuvre bientôt.
Je ne peux dire, mademoiselle, combien votre affection—car vous les aimez; votre livre et votre lettre en témoignent assez—pour mes compatriotes et mon pays me touche; et je suis fière de pouvoir le dire que les héroïnes de nos grandes épopées sont dignes de tout honneur et de tout amour. Y a-t-il d’héroïne plus touchante, plus aimable que Sîta? Je ne le crois pas. Quand j’entends ma mère chanter, le soir, les vieux chants de notre pays, je pleure presque toujours. La plainte de Sîta quand, bannie pour la seconde fois, elle erre dans la vaste forêt, seule, le désespoir et l’effroi dans l’âme, est si pathétique qu’il n’y a personne, je crois, qui puisse l’entendre sans verser des larmes. Je vous envoie sous ce pli deux petites traductions du Sanscrit, cette belle langue antique. Malheureusement j’ai été obligée de faire cesser mes traductions de Sanscrit il y a six mois. Ma santé ne me permet pas de les continuer. Je vous envoie aussi mon portrait et celui de ma sœur. Dans la photographie elle est représentée assise. Elle était si douce et si bonne. La photographie date de quatre ans, quand j’avais dix-sept ans et elle dix-neuf ans à peine. Moi aussi, mademoiselle, je vous serai reconnaissante de vouloir bien m’envoyer votre photographie. Je la garderai comme un de mes plus grands trésors.
Il faut que je m’arrête ici, je ne veux plus empiéter sur votre temps. Comme M. Lefèvre-Deumier il faut que je dise
Adieu donc, mon amie, que je n’ai pas connue,
car, mademoiselle, je vous compte parmi mes amies, et parmi les meilleures, quoique je ne vous aie pas vue.
Croyez, mademoiselle, à la nouvelle assurance de mon amitié.
TORU DUTT.
Chez son père, M. Govin C. Dutt, Honorary Magistrate and Justice of the Peace, Calcutta.
P.S. J’ai retardé jusqu’ici de faire remettre ma lettre à la poste; j’espérais recevoir le livre que M. Garcin de Tassy voulait bien m’envoyer. Mais je ne l’ai pas encore reçu, et la poste part demain. Je crois que peut-être j’aurai bientôt le bonheur de vous serrer la main. Nous espérons quitter l’Inde le prochain mois. Mon père veut absolument partir pour l’Europe. Il dit qu’il y a en France et en Angleterre des médecins plus savants que ceux de Calcutta; et de plus, nos médecins nous conseillent de changer de climat; cela, disent-ils, me fera plus de bien que toutes les drogues d’une pharmacie. Ce changement de nos projets m’oblige de vous prier de ne m’écrire qu’après avoir reçu encore de mes nouvelles.
Miss Toru Dutt to the same.
Calcutta, ce 13 Avril 1877.
MA CHÈRE MADEMOISELLE,—Ecrivez-moi, je vous prie, à l’adresse que je vous ai donnée dans ma lettre précédente. Je suis très malade au lit depuis une quinzaine; votre lettre et votre portrait me feront du bien. Tous nos plans sont changés; nous ne pourrons pas aller en Europe en Avril. L’homme propose et Dieu dispose.
Voulez-vous bien avoir la bonté, mademoiselle, de remercier M. Garcin de Tassy de ma part pour sa Revue? Elle est très intéressante. Je lui écrirai quand je serai plus forte.
Croyez, mademoiselle, à la nouvelle assurance de mon dévouement et de mon amitié très-sincères.
TORU DUTT.
Mlle Clarisse Bader to Miss Toru Dutt.
Paris, ce 11 Mai 1877.
CHÈRE MADEMOISELLE ET GRACIEUSE AMIE,—Quelle déception m’apporte votre dernière lettre! Je m’étais fait une véritable fête de vous voir, et de vous offrir verbalement l’expression de la vive sympathie que m’inspirent non-seulement vos œuvres si remarquables, mais vos lettres, qui révèlent une âme délicate et charmante, et aussi votre portrait si vivant et si expressif! Je prie Dieu qu’il vous guérisse bien vite, et croyez que dans ce vœu il y a aussi une part d’égoïsme, puisque c’est de votre rétablissement que dépendent vos projets de voyage. Vous êtes jeune, et la jeunesse est si puissante en ressources, surtout quand elle est doublée de la belle constitution que révèle votre charmant portrait! Savez-vous, chère mademoiselle, que ce portrait et vos lettres font des conquêtes dans mon entourage, à commencer par mon père et par ma mère? Ma famille et mes amis partageaient mon vif désir de vous voir, et aujourd’hui, hélas! ils prennent grandement part à ma déception!
S’il m’avait été possible de me faire photographier en ce moment, j’eusse recommencé à votre intention de tenter une épreuve qui ne m’a jamais réussi. Il paraît que la mobilité de mes traits fait le désespoir des photographes. Mes portraits sont tous plus laids les uns que les autres, et si j’étais coquette je ne les donnerais jamais, surtout à ceux qui ne me connaissent pas. Mais je ne suis pas coquette. Je vous envoie donc sous ce pli deux photographies qui remontent à 1872. C’était peu de mois après les terribles épreuves patriotiques que nous avions subies pendant les deux sièges de Paris, et j’avais encore les traits fatigués par de cruelles émotions. Ces portraits ont été faits à la campagne par un amateur, un officier supérieur de nos amis. Mon père est auprès de moi dans l’une de ces photographies. Lui aussi a été singulièrement vieilli par cette épreuve.
Quand je poserai de nouveau je vous enverrai le résultat de cette tentation si celle-ci est couronnée de succès. Je ferai mon possible pour seconder le photographe par ma tranquillité.
Je suis bien touchée d’avoir la douce image de votre regrettée sœur, qui partageait vos savantes et poétiques occupations. Je vous remercie de tout cœur de m’avoir envoyé ce pieux souvenir de famille.
Quand je verrai M. Garcin de Tassy je m’acquitterai de la mission que vous me confiez auprès de lui.
Je vous écris dans le petit oratoire qui est aussi mon cabinet de travail, et où je prie le bon Dieu de vous rendre force et santé. Je confie cette prière à la sainte Vierge.
Croyez, chère mademoiselle, que vous avez en France une amie qui serait heureuse de presser votre main.
Toute à vous,
CLARISSE BADER.
The next letter to Mlle Bader, written on the 30th of July, 1877, is pathetic in its simplicity, and shows that almost to the very last she was curiously unconscious of the approaching end.
Miss Toru Dutt to Mlle Clarisse Bader.
Ce 30 Juillet 1877.
CHÈRE ET TRÈS-AIMABLE AMIE,—Voilà bien quatre mois que je souffre de la fièvre; cela m’a empêchée de vous écrire et de vous exprimer plus tôt le grand plaisir que votre lettre et les portraits m’ont causé.
Cette bonne et sympathique lettre, arrivée dans un temps où je souffrais beaucoup, m’a fait plus de bien que tous les remèdes du médecin.
Je vous prie, chère mademoiselle, de vouloir bien m’excuser la brièveté de cette lettre; je ne suis pas tout à fait rétablie encore; et je ne puis aller de ma chambre à la chambre voisine sans sentir de la fatigue.
J’ai été bien malade, chère mademoiselle, mais le bon Dieu a exaucé les prières de mes parents; et je me rétablis peu à peu.
J’espère vous écrire plus longuement avant peu.
Toute à vous,
TORU DUTT.
Mlle Clarisse Bader to Miss Toru Dutt.
Ce 11 Septembre 1877.
CHÈRE ET CHARMANTE AMIE DE L’INDE,—J’ai manqué le dernier courrier de Brindisi, et je regrette d’autant plus ce retard involontaire que votre bonne et affectueuse lettre m’apprend que vous avez été malade et que vous étiez encore convalescente au moment où vous m’avez écrit. Eh quoi! la maladie a pu atteindre cette vive organisation que révèle votre portrait? Ces beaux yeux pleins de feu ont pu s’alanguir? Oh! mais alors, cela n’a pu être qu’un choc accidentel? Vous êtes tout à fait rétablie, n’est-ce pas, à l’heure actuelle? Et, à l’époque de l’Exposition, vous viendrez dans notre doux pays de France, dont les tièdes brises vous feront du bien, vous qui avez souffert de votre ardent climat. Des cœurs amis vous attendent avec une joyeuse espérance. Mes parents et moi nous vous aimons beaucoup — sans vous avoir jamais vue; mais vos lettres et vos œuvres nous ont révélé la bonté de votre cœur, la candeur de votre âme. Venez donc, mon aimable amie, sceller de votre présence une affection qui vous est déjà acquise.
Un véritable torrent d’occupations ne me permet pas de prolonger cette lettre, écrite d’ailleurs sous l’impression d’une extrême fatigue nerveuse. Je me ressens encore d’une indisposition qui n’a assurément rien de grave, mais qui vient d’ébranler ma forte santé. Cette indisposition m’a été amenée par un surcroît de travail que je me suis récemment imposé pour continuer à défendre la grande cause religieuse, qui malheureusement est toujours attaquée dans mon cher pays, mais qui, grâces en soient rendues à Dieu, trouvera toujours des défenseurs parmi nous. Qu’importe si, dans ces luttes où nos seules armes sont la foi et la charité, nous ressentons quelquefois l’atteinte de la fatigue et de la souffrance physiques! Ce sont là les blessures du combat, et ces blessures nous sont chéries.
Dites à vos dignes parents combien nous les félicitons de votre retour à la santé. Mon père et ma mère ont été particulièrement émus de cette phrase si simple et si touchante qui termine votre lettre: ‘J’ai été bien malade, mais le bon Dieu a exaucé les prières de mes parents, et je me rétablis peu à peu.’
Et moi aussi, chère et intéressante amie, je demande au Seigneur de vous conserver la bonne santé qu’Il vous a sans doute déjà rendue, et, en faisant ce vœu, je vous embrasse avec effusion.
CLARISSE BADER.
P.S. Je dépose sous ce pli une fleurette de mon pays. C’est ma plante favorite. On l’appelle rhodanthe. Cette jolie fleur rit toujours, même desséchée. Je trouve que par cela même c’est un vrai emblème de l’affection. La fleur que je vous envoie provient de ma petite chapelle domestique. Puisse-t-elle vous apporter une douce bénédiction du Seigneur en même temps que mon fidèle souvenir!1
If Toru’s life had been spared, the acquaintance thus begun would have ripened into a deep and lasting friendship. But no sooner had it begun than it ended, and Mlle Bader had only the melancholy satisfaction of seeing Toru’s French novel through the press. ‘Without ever having seen Toru, I loved her,’ says Mlle Bader, in her preface to this novel, Le Journal de Mlle d’Arvers, to be noticed hereafter. ‘Her letters revealed a frankness, sensibility, and charming goodness and simplicity, which endeared her to me, and showed me the native qualities of the Hindu Woman developed and transformed by the Christian civilization of Europe. And how could I rest insensible to such spontaneous and ardent affection evinced for me, across the distant seas, by a descendant of those Indian women who had inspired the work of the twenty-second year of my life?’ The late Dr. A. C. Dutt of Hull, whilst on a visit to Paris, called on Mlle Bader. This was the only opportunity afforded her of personal intercourse with any member of the Dutt family.
This correspondence first appeared in a memoir of his daughter, written by Mr. Dutt, in the edition of A Sheaf gleaned in French Fields, published by Kegan Paul & Co., in 1880. ↩︎